choc culturel

Choc culturel en voyage : comment s’adapter 

Le choc culturel en voyage est un entrechoquement entre la culture d’un voyageur nouvellement arrivé et celle de son pays d’accueil. Ce choc culturel, vous êtes en train de l’expérimenter. Vous vous retrouvez à faire face à des manières de penser et de faire différentes de ce dont vous avez l’habitude. Vous vous sentez dépaysé et plus encore frustré ou anxieux.

Il est important de comprendre qu’il est courant de faire cette expérience déstabilisante de la réalité du terrain. Néanmoins, sans réfuter toutes vos émotions, il faut savoir aussi les dépasser. Il est alors nécessaire de mettre de côté tous vos a priori et de vous laisser imprégner par la spécificité du lieu (Calbérac, 2007).

L’article s’appuie sur mon expérience personnelle et sur un travail rédigé dans le cadre de mon master de Géographie. Je souhaite vous montrer que vous n’êtes pas seul dans cette situation et surtout, qu’elle est surmontable.

 Courage à vous !

De notre imaginaire à la réalité

Le voyage, avant la confrontation à la réalité, est un produit de notre imagination. Il est défini à la fois par des retours de nos proches sur ce même terrain mais aussi, et en grande partie, par notre travail de recherche via le net (les lieux à visiter, les bons plans, etc.). 

Ce travail sur internet, c’est à dire la phase de collecte d’informations, peut-être déterminante. Elle influence en effet notre perception du pays d’accueil et alimente l’imaginaire quant à la future expérience vécue.  

Mais l’arrivée sur le terrain n’est en réalité pas tout le temps si simple et conforme à ce que l’on a pu lire. Si le fait de voyager est aujourd’hui pensé comme quelque chose de relativement commun, la déstabilisation vécue face à la nouveauté n’en est pas autant relatée

Les premiers voyages, surtout en solitaire et sur des temps longs, peuvent être le moment d’une déstabilisation individuelle à apprivoiser pour le voyageur. 

Le premier terrain est toujours un saut dans l’inconnu, l’épreuve de vérité…

Griaule
1977

Attention, des nuances sont à apporter. Cela dépend de votre personnalité, de la durée de votre voyage et surtout du lieu de destination ! Par exemple j’ai vécu un an à Montréal et je n’ai pas éprouvé cette expérience-là. Alors que je suis restée trois semaines en Inde et deux mois au Cambodge, et les débuts ont été déroutants.  

Inde choc culturel en voyage

Inde, 2012 © 2 0 2 3  G o l d e n t u r t l e s

L’individualité à l’épreuve : Le choc culturel en voyage

La notion d’espace vécu sous-tend une teneur émotionnelle liée à la pratique de celui-ci.

En géographie, les anthropologues qui ont analysé le vécu intériorisé du chercheur sur le terrain parlent de variation entre : le “miracle intérieur” (décrit par Clifford Geertz) au “traumatisme de déracinement voire de névrose de terrain” (évoqué par Francis Affergan).

Cette anxiété, présente chez des voyageurs dans un environnement social et/ou culturel qui leur est nouveau, je l’ai ressentie durant mon séjour au Cambodge.

Un extrait de mes carnets personnels :

Je ne sais pas si c’est normal que je ressente ce vide, ce malaise dès le début de mon séjour, mais c’est le premier sentiment qui m’envahit au réveil. J’ai perdu tous mes repères, et cela m’épuise moralement. Je suis comme lâchée dans un tourbillon inconnu. Tout est différent : la langue, les coutumes, les manières de se comporter. Et je me sens vraiment seule.

Qu'est-ce que le "choc culturel" en voyage ?

Ces affects reviennent avec la notion de “choc culturel” d’Oberg (1960). Selon son modèle, 4 étapes peuvent être vécues sur le terrain :

  • La lune de miel quand tout est nouveau, fascinant et rend le voyageur euphorique.
  • La crise qui se déclenche quand les choses qui avaient anciennement conquis l’individu se transforment en peur irrationnelle, anxiété et mal du pays.
  • La récupération quand le voyageur arrive à surmonter la crise et s’ouvre à la nouvelle culture. Il reprend confiance dans le lieu.
  • L’adaptation illustre l’acceptation et la prise de plaisir de nouvelles expériences.
Choc culturel en voyage

Étapes du choc culturel © 2 0 2 3  G o l d e n t u r t l e s

La phase de crise du choc culturel en voyage

Si l’on s’intéresse plus particulièrement à la phase de crise du choc culturel en voyage, elle peut se manifester par :

  • Des émotions telles que la frustration, l’irritabilité et l’anxiété, temporaires ou récurrentes. Ce malaise affecte le quotidien et prend de l’ampleur avec les jours. 
  • Un manque d’intérêt pour les activités sociales et la découverte du pays. Un fort désir d’être seul, d’être enfermé dans un espace personnel se fait ressentir. Cette envie de s’isoler peut-être causée par une sensibilité accrue aux stimuli extérieurs qui menacent et affectent le bien-être émotionnel.
  • Une tendance à éviter tout contact avec les locaux. Ou alors une difficulté à établir des relations significatives et durables donc un sentiment de solitude et de déconnexion.
  • Une difficulté à s’adapter à la nouvelle culture et aux façons de vivre. Cela peut se traduire par des jugements négatifs sur les coutumes et les traditions locales. 
  • Une confusion identitaire, un manque de repères, et une perte de confiance en soi peuvent également se manifester. 
Cambodge choc culturel en voyage

Shop de plastique – Phnom Penh Cambodge, 2019 © 2 0 2 3  G o l d e n t u r t l e s

S’adapter et dépasser le choc culturel en voyage

Appréhender la crise comme une découverte de soi

Ce qui peut être intéressant, c’est d’envisager la crise comme un passage mais non pas comme une fin en soi

Les difficultés rencontrées peuvent être des produits de notre recherche au préalable, de notre peur de l’inconnu et doivent être recueillies et interrogées. Il ne faut non pas se laisser submerger ou mettre cette peur de côté mais voir cela comme quelque chose à creuser, à définir et à dépasser

C’est un indicateur aussi que le voyageur est dans un processus de découverte de soi et cette inquiétude est une donnée en elle-même.  

En ce sens, j’ai lu un article qui disait que l’interaction avec l’Autre, qui provoque le choc, est une expérience subjective de la différence. Elle est interprétée comme une tension externe entre l’Autre et nous-même, alors que c’est souvent un choc de soi : une tension interne. (VARHEGYI, NANN, 2009.)

Je trouvais intéressant d’illustrer le fait que ces recherches de positionnalité offrent un miroir de son soi et de sa quête de découverte

Voir la différence comme un apprentissage

De plus, en voyage, il faut savoir se montrer conciliant, faire preuve d’initiative et ne plus craindre la nouveauté. Ce qui est étranger ne l’est pas, tant qu’il est perçu comme étranger. En favorisant le processus d’acclimatation et de familiarisation, ces peurs disparaîtront et les moments vécus ne seront plus aussi inconfortables. 

Il faut également réussir à mettre de côté notre réflexe égocentrique. En effet, en nous retrouvant dans un contexte différent de celui auquel nous sommes habitués, nous cherchons absolument à le recréer. Et comme ceci n’est pas possible, cela nous met en colère ou nous frustre. Il faut alors apprendre à s’ajuster, à se conformer à de nouvelles règles et à garder l’esprit ouvert.

S’imprégner des lieux et de la langue

Dans cette même idée, partir en voyage consiste avant tout à se familiariser avec le territoire qui deviendra notre lieu de vie pendant un certain laps de temps.

L’apprentissage de la langue ou la connaissance de repères historiques et culturels constituent un moyen intéressant pour « rentrer en connivence », selon l’expression de Joël Bonnemaison. 

En se frottant à la « rugosité du terrain » et à sa matérialité, on peut explorer les coutumes locales, la nourriture, les habitants et les activités, tout en découvrant les perspectives uniques sur le monde. Cela permet de découvrir des lieux emblématiques, renforçant ainsi notre ouverture à l’espace.  

Hanoi, Vietnam - Goldenturtles

Hanoï | Vietnam, 2013 © 2 0 2 3  G o l d e n t u r t l e s

 

Sortir, rencontrer du monde, participer à des activités

S’approprier le terrain exige aussi un recours à des personnes ressources. Rencontrer des locaux ou des expatriés permet de mieux appréhender l’espace et l’articulation autour. 

Pour ma part, c’est la formation d’un groupe de français au Cambodge qui m’a permis de me sentir plus à l’aise. On faisait des activités ensemble, on a découvert la ville de Phnom Penh et le pays ensemble. Côtoyer des personnes qui vivent la même chose vous favorise la création de lien et contribue à se sentir moins seul. Leur adaptation dans le pays, leur potentiel mal-être, les solutions qu’ils ont mis en place pour faire face à ça : vous pouvez partager ce genre de moment avec eux. 

Communiquer avec ses proches

Rien de mieux qu’un appel avec ses proches ou ses amis restés en France pour se rebooster ! Ils apportent du réconfort et surtout ce sentiment de familiarité que l’on peut chercher.

De plus, recevoir des conseils de personnes extérieures à notre aventure nous aide à prendre du recul et à mieux comprendre nos ressentis. Cela peut améliorer notre moral et nous fait nous sentir plus confiant pour la suite. 

Profiter de l’instant présent

C’est peut être difficile à lire, surtout quand nous nous sentons mal, mais nous sommes chanceux de pouvoir voyager ! Il faut prendre conscience de l’éphémérité de l’expérience et cultiver quotidiennement notre émerveillement.  

Savourer chaque moment, quel qu’il soit, est tout aussi important. Cela peut signifier se détendre et apprécier la vue ou simplement se perdre dans les rues d’une ville sans itinéraire précis.

N’oubliez pas que le but d’un voyage n’est pas seulement de voir de nouvelles choses, mais aussi de se reconnecter avec soi-même. Profiter de l’instant présent lors d’un voyage peut permettre de vivre une expérience plus authentique, plus enrichissante et plus détendue

Koh Rong Sanloem Cambodge - Goldenturtles

Koh Rong Sanloem | Cambodge, 2019 © 2 0 2 3  G o l d e n t u r t l e s

Des limites ?

Malgré le fait d’avoir essayé toutes les « solutions » énoncées au dessus, vos problèmes ne sont pas résolus et vous continuez de vous sentir mal. C’est aussi ok ! 

Notre capacité d’adaptation ne peut tout résoudre. Parfois, même en ayant les meilleures intentions du monde, nous n’arrivons pas à faire face aux « attaques » physiques et psychologiques du pays d’accueil. La sensation de malaise reste insurmontable. 

Cela peut être un signe que nos valeurs personnelles sont en jeu et il est normal d’être perturbé lorsqu’elles sont questionnées. C’est bien de défendre ce en quoi nous croyons, on ne vous demande pas de passer outre. Attention néanmoins à le faire avec maturité, prévenance et bienveillance. 

Relater et questionner les difficultés liées au choc culturel en voyage permet de sortir d’une vision romantisée commune.

Il est intéressant de parler de ces expériences de plaisir et de souffrance car elles sont, selon moi, rarement évoquées sur les réseaux. L’humilité que cela demande et la peur de la remise en question de sa propre légitimité en tant que voyageur/blogueur voyage peut peut-être expliquer la rareté de ce genre de témoignages. 

Une dernière chose, si votre mal-être ne passe pas, n’hésitez pas à contacter un professionnel. Il vous accompagnera dans les différentes étapes d’adaptation. Vous pouvez aussi m’envoyer un petit message sur les réseaux si vous avez besoin de parler.

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Aussi, n'hésitez pas à le partager sur vos réseaux, merci ☺

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